Durant sa campagne pour la présidence, le futur Président Emmanuel Macron a fait une promesse d’ampleur aux salariés démissionnaires et aux travailleurs indépendants : l’ouverture de leurs droits aux allocations chômage. Une avancée considérable en termes de reconnaissance et de lutte contre la précarité de certains indépendants initiée par la loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel. Mais où en est-on à ce jour ?
1. Principaux objectifs de la réforme en direction des travailleurs indépendants
La lutte contre le recours abusif aux contrats courts
Avec la mise en place d’un bonus-malus financier sur les cotisations d’assurances-chômage des entreprises de plus de 11 salariés (variation de leurs cotisations entre 3 et 5 % de la masse salariale après étude au cas par cas) pour favoriser les emplois ou missions de longue durée. Sont principalement concernés les secteurs de l’industrie alimentaire, des activités spécialisées / scientifiques et techniques, l’hébergement et la restauration, l’assainissement des eaux / la gestion des déchets et la dépollution, les transports et l’entreposage, la fabrication de produits en caoutchouc / en plastique et autres produits non métalliques, le travail du bois / l’industrie du papier et l’imprimerie.
Faire en sorte que le travail paye plus que le non emploi
En établissant de nouvelles règles d’indemnisation incitatives au retour à l’emploi et en réduisant le cumul revenus et allocations.
Le renforcement de l’accompagnement des demandeurs d’emploi
Avec le recrutement d’un millier de nouveaux conseillers Pôle Emploi et la mise en place de deux demi-journées d’accompagnement intensif pour chaque demandeur d’emploi.
2. Chronologie des grandes étapes de la réforme
1er novembre 2019, introduction de nouvelles règles d’indemnisation : durée minimale de travail, rechargement des droits, dégressivité des allocations pour les hauts revenus, ouverture des droits aux salariés démissionnaires et aux indépendants. La crise sanitaire et économique du COVID a provisoirement provoqué la suspension de ces mesures pour les demandeurs d’emploi dont la fin de contrat est intervenue entre le 1er août et le 31 décembre 2020, les autres ne sont pas concernés car pas de rétroactivité.
1er janvier 2020, mise en œuvre par Pôle Emploi des nouvelles mesures et procédures d’accompagnement pour les nouveaux inscrits et les travailleurs précaires.
1er septembre 2020, le changement du mode de calcul de l’allocation chômage devait débuter. Crise sanitaire oblige, un premier report rendait la réforme effective au 1er janvier 2021, un second report fixe désormais l’application de ce second volet de la réforme au 1er avril 2021.
1er mars 2021, dernière étape, en se basant sur 2020 comme année de référence, le bonus-malus sera une réalité pour les entreprises qui abusent des contrats courts… sous réserve d’un report probable qui n’est pas encore à l’ordre du jour.
3. Qui est concerné par la réforme de l’assurance chômage des indépendants ?
Jusqu’à présent appliquée uniquement pour ceux dont le contrat s’est achevé entre le 1er novembre 2019 et le 31 juillet 2020, la réforme de l’assurance chômage a concerné :
Les nouveaux inscrits
Justifiant d’au minimum de 6 mois d’activité sur une période de 2 ans, ou 130 jours, ou 910 heures, période rallongée à 3 ans pour les plus de 53 ans.
Ce qui change : la durée d’activité requise a été allongée de 2 mois et en retour, la durée minimale d’indemnisation est passée de 4 à 6 mois. La durée maximale reste de 2 ans pour les moins de 53 ans, 2 ans 1/2 pour les 53-55 ans et 3 ans pour les plus de 55 ans.
Les « permittents »
Alternance de contrats courts et de périodes de chômage qui rechargent leurs droits si ils reprennent une activité professionnelle pendant leur période d’indemnisation.
Ce qui change : ils doivent justifier de 6 mois de travail (contre 1 avant la réforme), seuil rabaissé à 4 mois depuis fin juillet 2020 pour aider les demandeurs d’emploi en cette période de crise sanitaire et économique.
les bénéficiaires « hauts revenus » (supérieurs à 4500 euros bruts mensuels).
Ce qui change : une baisse de 30% de l’allocation au bout de 7 mois. Eux aussi bénéficient d’un report d’application de cette dégressivité au 1er janvier 2021.
La réforme prévoit d’élargir le champ des bénéficiaires – sous conditions – au salarié démissionnaire avec au minimum 5 ans d’ancienneté à un même poste en CDI ayant un projet de reconversion professionnelle qui se verra évalué par une commission paritaire interprofessionnelle.
Le travailleur indépendant
Il sera indemnisé à hauteur de 800 euros par mois pendant 6 mois en cas de liquidation judiciaire. Il faudra cependant que son activité professionnelle d’indépendant ait duré au moins 2 ans en générant un revenu minimum de 10000 euros par an sur ces mêmes deux dernières années.
4. Les changements dans le mode de calcul des allocations
Le mode de calcul de l’allocation chômage, qui a donc pour le moment été reportée au 1er janvier 2021, et qui devrait être de nouveau reporté au 1er avril 2021 en raison de la crise sanitaire, aurait eu « un effet sensible sur l’indemnisation des personnes privées d’emploi dans la période de crise sanitaire et n’ayant pas travaillé de manière continue sur les deux ou trois années précédentes », selon le rapport de juillet 2020 de l’Unédic. En effet, le calcul sera basé une fois la réforme opérationnelle, sur un revenu moyen mensuel des jours travaillés et des périodes d’inactivité et non plus sur le salaire journalier. En contrepartie de la baisse de l’allocation pour les allocataires travaillant de manière fractionnée, la durée de leurs droits sera rallongée.
En bref, il s’agit d’une réforme favorable aux travailleurs indépendants qui bénéficieront de la reconnaissance de leur statut de travailleur à part entière, d’un soutien financier le temps de rebondir ou de trouver de nouvelles missions en freelance. En espérant que la crise économique et sanitaire qui nous secoue à tous ne reporte pas trop la mise en place définitive de la réforme…